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24/03/2013

DE LOURDES MENACES PESENT SUR L'AVENIR DU PROJET EUROPEEN

Editorial

Dans un peu plus d’un an, les citoyens d’Europe seront appelés à élire leurs représentants au Parlement européen.

Dans un peu plus d’un an, ils auront ainsi la possibilité de s’exprimer. Ils auront la parole, eux qui, à juste titre, souhaitent pouvoir être consultés sur les choix faits en leurs noms par des instances dont ils ne saisissent pas toujours la nature et la consistance des pouvoirs qu’elles exercent.

Or, les citoyens d’Europe vont s’exprimer dans un contexte particulièrement crucial et qui pourrait être mortel pour l’avenir de l’Europe si un sursaut pédagogique et démocratique ne se développe pas rapidement dans le cadre des différents Etats de l’Union.

L’Europe est en effet confrontée à une grave crise de confiance. Le mot Europe est désormais synonyme de crise économique et sociale, de rigueur et de plans d’austérité, de perte de pouvoir d’achat, de chômage.

Elle est également confrontée à une grave crise d’identité car une fois de plus les effets pervers d’un élargissement trop rapide et trop large ont apporté plus d’insécurité et d’angoisses à des peuples qui devaient d’abord se rapprocher et consolider leurs assises par des institutions communes, démocratiques et efficaces.

Des décisions irresponsables, précipitées et ayant davantage pour motivation l’élargissement d’un marché alors que la motivation première se devait être de faire naître des solidarités et promouvoir une authentique citoyenneté européenne, ont fait reculer l’adhésion des peuples au projet européen.

Ceux qui ont pris ces décisions, à savoir pour l’essentiel la plupart des dirigeants nationaux des différents Etats de l’Union, ont pris devant l’histoire une grave part de responsabilité si d’aventure le projet européen devait cesser d’être la grande ambition de nos peuples.

Nous voyons monter en puissance les populismes avec leurs solutions radicales et forcément simplistes dans l’indifférence générale de femmes et d’hommes politiques aux tièdes convictions qui mettent leur drapeau européen dans leurs poches.

Face à la colère qui monte, face au tumulte des insultes, face aux révoltes qui ici et là se développent, nous ne voyons qu’impuissance chez ceux qui ont en charge de conduire les peuples vers un avenir meilleur et silence chez ceux qui  ont l’impérieux devoir d’être les plus ardents et fervents partisans d’une Europe politique, fédérée et intégrée qui serait au service des peuples avant d’être au service d’intérêts hélas trop souvent mercantiles et financiers.

L’idéal européen, une conscience européenne, une citoyenneté européenne, ce sont là des valeurs qui méritent que l’on  accepte de croiser le fer avec ceux qui n’aspirent qu’à une chose : détricoter le projet européen en profitant de l’actuel désarroi des peuples. 

Force est de constater qu’une fois de plus les populistes se livrent à une véritable exploitation des peurs. Leur opération de récupération est à l’œuvre ainsi que le repli identitaire propre à toutes les périodes de grave crise économique, sociale et morale.

Le phénomène se développe désormais à l’échelle de l’Europe : Pays-Bas, Autriche, Italie, Belgique, Grande-Bretagne, Grèce, Malte, Allemagne, France….

Le mal est donc profond et risque d’être durable car nous ne voyons s’élever aucun leader européen au discours clair et prophétique, nous ne voyons aucun docteur prescrire les remèdes qui s’imposent en ayant le courage de dire la vérité, nous ne voyons aucun pédagogue expliquer les étapes qu’il convient de franchir pour regagner confiance et crédibilité, nous ne voyons aucun responsable politique prendre le flambeau du combat pour l’émergence d’une Europe politique digne de ce nom avec  des pays ayant fait le choix d’un tel projet.

2014, c’est demain. Une fois de plus, des candidats vont être désignés par des partis politiques dans la plus grande opacité. Ils feront, pour s’en tenir au seul cas de la France, une campagne le plus souvent franco-française et l’enjeu européen sera souvent totalement absent de leurs discours. Le taux d’abstention sera une fois de plus là encore  très important car tout aura été fait  en amont pour détourner les électeurs du chemin des urnes et rendre cette campagne la plus terne qui soit. Le ressentiment contre l’Europe étant grand, beaucoup de dirigeants se feront critiques à son égard et, à l’instar des scrutins européens précédents, les adversaires de la construction européenne donneront de la voix alors que ses défenseurs se feront discrets et adopteront un profil bas.

Est-il permis encore d’en appeler aujourd’hui avant qu’il ne soit trop tard à un authentique sursaut et à un engagement solennel des plus ardents défenseurs de la cause européenne pour inverser le cours des choses, le cours  de l’histoire ? Nous osons l’espérer mais il est désormais bien tard !

En 2014, Les peuples d’Europe ont rendez-vous avec leur destin.

Gérard-David Desrameaux

Directeur de la Lettre ECP

10/02/2013

POUR UN CONSENSUS EN MATIERE ELECTORALE

Editorial

Le droit électoral est un droit extraordinairement mouvant, sinon instable, à l’instar du droit en général d’ailleurs. En effet, les modifications se succèdent et parfois, trop souvent hélas, s’ajoutent les unes aux autres au gré des alternances, voire des circonstances.

La cohérence de ces réformes n’est pas évidente car elles sont faites par ajouts successifs et selon des logiques différentes et parfois contradictoires.

Il en ressort une impression de flou, voire d’illisibilité.

Il serait facile d’épiloguer et d’ironiser sur la réforme instituant un conseiller territorial, votée, inscrite dans les textes et qui ne sera jamais mise en vigueur (en principe, car peut-on employer le terme jamais en ce domaine ?), un nouveau projet étant appelé à s’y substituer, instaurant au demeurant un scrutin binominal dont je demeure persuadé en mon intime conviction qu’il sera pour le moins extraordinairement difficile à mettre en œuvre et qu’il constitue, que l’on me pardonne l’expression familière, une terrifiante usine à gaz dont les bienfaits attendus ne seront en tout état de cause pas au rendez-vous.

J’expliciterai ultérieurement cette prise de position, mais il serait opportun qu’en conscience, juristes et spécialistes prennent leur responsabilité et en appellent à plus de bon sens. La politique implique que l’on prenne en considération toutes sortes de paramètres, le souci de la parité ne pouvant pas au demeurant tout expliquer et tout autoriser. Trop de contraintes, trop d’encadrements, dans le choix des candidats ne peut que déboucher sur une restriction du choix offert à l’électeur, au citoyen, en d’autres termes à la liberté de vote.

Ceci vaut aussi  pour d’autres législations et réglementations qui par leur nombre et leurs abus risquent de porter préjudice et atteinte, si l’on n’y prend garde, tout simplement à la liberté de chaque citoyen.

Dans un domaine tel que celui du droit électoral, on ne peut que déplorer une telle instabilité alors même que l’on se trouve au cœur du système démocratique qui suppose de la clarté, de la continuité et de la sécurité juridique, cette  dernière, notamment,  étant nécessaire dans tout Etat de droit.

Le droit électoral étant, comme il vient d’être dit au cœur même de la démocratie, il serait souhaitable, là aussi, d’en appeler à un ou à des modes de scrutin compris et accepté(s) par le plus grand nombre et qui permette(nt) à la démocratie de vivre et s’épanouir pleinement et de la façon la plus harmonieuse qui soit.

A cet égard, il serait opportun, mais le temps presse car les échéances se rapprochent, de reconsidérer le mode de scrutin retenu pour les élections européennes depuis la réforme intervenue en 2003 afin de tenir compte de ses défauts sur lesquels il sera aisé de revenir une autre fois et de réintroduire le mode de scrutin en vigueur de 1979 à 2003 qui avait pour sa part  donné toute satisfaction.

J’entends les critiques : Vous appelez à moins d’instabilité en matière de droit électoral et vous préconisez une nouvelle réforme ! La réponse est simple : La raison justifiant une telle réforme s’inscrit dans une recherche de simplification, de clarté et d’efficacité et se limite à un retour à une législation antérieure qui avait fait ses preuves hors de toute opacité, l’élection se faisant à la représentation proportionnelle sur la base d’une liste nationale et non plus de listes élaborées dans le cadre de « grandes régions » artificiellement composées pour la circonstance mais ne correspondant à aucune réalité juridique précise.

 

Gérard-David Desrameaux

Directeur de la Lettre ECP

25/11/2012

LA DEMOCRATIE BLESSEE

Editorial

A trop vouloir rassembler et faire vivre dans une structure unique des courants de pensée antagonistes et tout compte fait fondamentalement opposés, on crée des machines de guerre électorale dépourvues de toute efficacité.

L’affligeant spectacle auquel nous venons d’assister, spectacle qui au demeurant se poursuit sous nos yeux médusés, de par la volonté des dirigeants d’une grande formation politique, hier détentrice du pouvoir et candidate pour demain à l’exercer de nouveau, ne peut réjouir tout démocrate et républicain sincère.

C’est la démocratie qui est blessée par de tels comportements et ceux-ci font le jeu de tous les extrémistes et populistes aux propositions simplistes, voire dangereuses, qui déjà croient leur heure arrivée et savourent leur victoire annoncée.

On ne peut que s’étonner de tels comportements et errements de la part d’hommes et de femmes, responsables et politiques confirmés, alors même que la France, à l’instar de bien d’autres pays, est confrontée à des difficultés, économiques, financières et sociales et que l’avenir s’annonce particulièrement sombre pour nombre de nos concitoyens.

Le combat pour la démocratie ne souffre d’aucun répit. Et, si les partis politiques, si souvent décriés, notamment sous la IVe république et plus particulièrement encore par  le général de Gaulle tant sous la IVe République que sous la Ve République, participent et concourent à l’expression du suffrage comme le prévoit la Constitution, force est de constater qu’ils sont loin de donner toujours satisfaction - et c’est un euphémisme – tant ils se prêtent à des simulacres de démocratie en interne, mettant ainsi en contradiction leurs actes et leurs paroles.

J’ai souvent eu l’occasion de mettre l’accent,  tant dans mes écrits que lors de mes interventions, sur cette distorsion.*

J’invite celles et ceux qui sont intéressés par ce thème à s’y reporter et les dirigeants de partis politiques seraient bien inspirés d’en tirer les enseignements au plan comportemental, s’ils entendent retrouver le crédit auquel ils aspirent, et des raisons sérieuses de croire en leur destin et plus encore en celui des femmes et des hommes pour lesquels ils sont censés se battre et sans lesquels ils ne seraient pas au niveau de responsabilité qui est le leur.

Les démocrates et républicains n’entendent pas hurler avec les pourfendeurs patentés des hommes politiques.

Aussi, doivent-ils être entendus des politiques responsables car ils ne souhaitent pas désespérer de la politique et moins encore du politique.

Trop de divisions inutiles, de slogans meurtriers, de double langage, de propos inappropriés, de phrases assassines, d’images dévoyées, de postures et de jeux de rôle nuisent à l’image du politique et de la politique.

A vouloir être le parti unique d’un camp, on finit par oublier que le pluralisme est à la base de la démocratie. A trop vouloir étreindre, on étouffe, on asphyxie. Il en est ainsi également en politique.

Gérard-David Desrameaux

Directeur de la Lettre ECP

 

 * Esquisse d’une démocratie nouvelle – Pour une éthique en politique, Editions Lanore, 2007

Sur ce site, notamment :

« A propos des partis politiques », 17 juin 2012

« 2012, année électorale », 7 janvier 2012