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17/10/2015

UN REFERENDUM INOPERANT

Editorial

 Le Parti socialiste organise ce week-end un référendum destiné aux militants et sympathisants de gauche, la question posée étant : « Face à la droite et à l’extrême droite, souhaitez-vous l’unité de la gauche et des écologistes aux élections régionales ? ».

Cette procédure me paraît tout simplement inadaptée eu égard à la conjoncture politique nationale et internationale et aux dissensions qui existent au sein de la gauche dans son ensemble dans le contexte actuel, et de surcroît totalement inopérante au regard de la question posée.

Une telle initiative accrédite l’idée que le Parti socialiste n’a pas pris l’exacte mesure de la nature des problèmes qui préoccupent la population et des raisons qui éloignent les électeurs des urnes et favorisent la montée en puissance du  phénomène du rejet des politiques – je ne dis pas de la politique – ainsi que le succès des populismes.

Aujourd’hui, la situation n’est plus identique à celle dans laquelle se trouvait la France dans les années soixante et soixante-dix, époque où François Mitterrand oeuvrait à juste titre pour l’Union de la gauche.

Le rapport des forces  politiques n’est plus le même, les enjeux géostratégiques sont infiniment plus complexes dans un monde déstabilisé et les institutions de la  Ve République ont montré, au fil du temps et des alternances successives, que la règle du « camp contre camp » n’était plus adaptée et ne répondait plus aux exigences actuelles.

Il ne suffit plus d’appeler à l’unité de la gauche pour être en mesure de l’emporter et d’obtenir l’adhésion du corps électoral. Il faut  désormais avoir une vision différente de la politique, une approche plus consensuelle, plus à même d’appréhender les problèmes dans leur globalité et également être davantage à même de transcender les clivages et les choix partisans, afin de mieux servir l’intérêt général dans le respect des libertés individuelles.

Plutôt que de se lancer dans une opération référendaire aléatoire, sans aucune garantie démocratique et sans aucun impact réel sur la réalité des choses et sur la suite des événements, sans doute serait-il plus opportun de faire preuve d’imagination et de novation, de fixer des objectifs clairs, précis et ambitieux. Sans doute, aussi et surtout, serait-il plus utile de lancer une campagne en faveur d’une plus juste représentation des forces politiques, autrement dit  d’une loi électorale permettant à chaque parti de défendre en toute indépendance son projet, ses idées et donc de pouvoir mesurer concrètement l’impact de son discours, de son message ?

La démocratie serait évidemment la grande bénéficiaire d’une telle démarche.

Gérard-David Desrameaux

17/07/2015

Du bon usage de l'article 49-3 de la Constitution

Aux termes de l’article 49-3 de la Constitution de 1958 : « Le Premier ministre peut, après délibération du Conseil des ministres, engager la responsabilité du gouvernement devant l’Assemblée nationale sur le vote d’un projet de loi de finances ou de financement de la Sécurité sociale. Dans ce cas, ce projet est considéré comme adopté, sauf si une motion de censure, déposée dans les vingt-quatre heures qui suivent, est votée dans les conditions prévues à l’alinéa précédent. Le premier ministre peut, en outre, recourir à cette procédure pour un autre projet ou une proposition de loi par session.»

Dans le cadre de la procédure relative à la loi dite loi Macron, le gouvernement a eu recours en toute légalité par trois fois à la procédure de l’article 49-3 rappelée ci-dessus.

Pour autant, certains,  et c’est le cas notamment de partisans du Front de gauche, parlent de « violation tragique » de la Constitution et, d’autres, on en trouve sur de nombreux bancs de l’Assemblée nationale, se lancent dans des diatribes insensées contre le recours à cet article.

Ainsi, M. Christian Jacob, fin juin 2015, s’adressant au Premier ministre lors du débat relatif à la loi Macron, précisément, a notamment déclaré : « On se souviendra de vous ici comme le Premier ministre  qui a humilié et trahi sa majorité, qui a violenté le Parlement et notre Constitution pour un tout petit dessein : se maintenir coûte que coûte à Matignon.»

De tels propos émanant d’un dirigeant se réclamant du gaullisme a de quoi surprendre. Car, en effet, s’il est exact que l’ancien président de la République, M. Nicolas Sarkozy, a réduit les possibilités de recourir à la procédure de l’article 49-3 lors de la vingt-quatrième révision de la Constitution en 2008, cette faculté, pièce maîtresse du parlementarisme rationalisé introduit par le Constituant de 1958, a permis à de nombreuses reprises à différents gouvernements de droite, du centre et de gauche de faire adopter sans vote de nombreux textes.

En vérité, le recours à l’article 49-3 ne mérite ni l’excès d’indignité ni l’excès d’honneur dont il fait généralement l’objet lors des débats qui y sont consacrés.

En l’état actuel des choses, il est cependant permis de faire les observations suivantes :

Le recours à cet article doit demeurer, sinon d’un usage exceptionnel, d’un usage modéré. Il doit intervenir au terme de procédures et de débats qui doivent être les uns et les autres particulièrement riches. Il doit être de nature à rasséréner les esprits et éviter des débordements excessifs susceptibles de dénaturer le sens d’un texte et l’esprit d’un projet ou d’une réforme. A cet égard, il peut se présenter comme une arme efficace contre ceux qui s’efforcent de faire obstruction et de bloquer le jeu parlementaire.

Or, dans les faits, la procédure est demeurée assez exceptionnelle depuis le début du quinquennat. En l’espèce, s’agissant de la loi Macron, on ne peut vraiment pas dire qu’il n’y a pas eu de débat. Le recours à l’article 49-3 n’est intervenu qu’au terme de plusieurs mois de débats souvent passionnés, l’examen d’un nombre considérable d’amendements et l’ajout d’un nombre également considérable d’articles. Une réserve peut être cependant émise s’agissant du deuxième recours à cette procédure au début du deuxième examen du texte par l’Assemblée nationale dans la mesure où des dispositions nouvelles introduites après le passage devant le Sénat ont pu être adoptées sans avoir fait l’objet d’un débat. Il est évident que cela doit être en tout état de cause proscrit car il n’est pas acceptable que des dispositions non examinées puissent être adoptées sans vote.

En revanche, dans l’hypothèse où nous nous  dirigerions vers ce que j’appelle de mes vœux, à savoir l’instauration d’une authentique démocratie pluraliste fondée sur la recherche de consensus par l’émergence de majorités d’idées voire de majorités de projets, il conviendrait de conserver voire de renforcer le recours à l’article 49-3 afin d’éviter l’enlisement et le blocage, autrement dit le retour à un régime d’assemblée.

 

Gérard-David Desrameaux

28/04/2015

Le "ministérialisme", cette maladie infantile

Editorial

Le « ministérialisme », dans sa forme moderne, cette maladie infantile de ceux qui concourent au discrédit de la politique se répand à une vitesse incroyable dans notre pays.

« Faut-il ou non entrer au gouvernement ? » Telle paraît être la question « existentielle » que semblent se poser quelques élus qui ne représentent souvent qu’eux-mêmes.

Ces élus – ils se reconnaîtront aisément – jouent un jeu particulièrement dangereux. Ont-ils conscience qu’ils donnent de la politique la pire image qui soit, celle d’une comédie qui pourrait évoluer vers une mauvaise farce avant de sombrer dans une tragédie ?

Il est évident que la pression exercée par certains, impliquant une inflexion de la politique, conduirait à donner l’impression, si elle était suivie d’effet, de revenir aux méthodes et comportements les plus décriés à juste titre de feu la IVe République.

Ce n’est pas ainsi que l’on réconciliera les Français avec la politique à un moment où celle-ci est dénoncée, au demeurant plus que de raison.

Les petites luttes intestines, les débauchages individuels de quelques seconds couteaux en mal de notoriété, les jeux stériles d’appareils souvent déconnectés du monde réel et au sein desquels les règles élémentaires de la démocratie prônées à l’extérieur sont souvent méconnues, donnent de la politique une représentation politicienne qui nuit à l’essence même du politique.

Oui, assurément, le  « ministérialisme » dans son acception contemporaine est bien un danger pour la démocratie, un cancer pour la politique.

Gérard-David Desrameaux