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13/12/2015

UN MODE DE SCRUTIN INIQUE

Editorial

 J’ai toujours été critique à l’égard des modes de scrutin qui n’assurent pas une représentation équitable des forces politiques et ne permettent pas au pluralisme de s’exprimer vraiment comme il devrait pouvoir le faire dans un Etat de droit.

Les élections régionales interpellent la classe politique car nous voyons bien vers quoi peut déboucher un système qui était destiné à assurer un pouvoir pérenne à certains partis politiques incapables d’anticiper demain et d’envisager leur perte d’influence.

L’état des forces en présence n’est évidemment pas immuable et ce qui vous favorise un jour peut vous pénaliser un autre jour.

Certains ne pensent jamais à « l’effet boomerang » toujours possible résultant d’une mesure ou d’une décision, alors que tout bon politique devrait y songer.

Il convient, en tout état de cause de faire un constat : la recherche à tout prix d’une majorité pour assurer la stabilité d’exécutifs dits forts, stables, cohérents et homogènes n’est pas une approche éthique et sérieuse.

En effet, il s’agit en l’espèce d’une fausse représentation proportionnelle, d’un système mixte au caractère majoritaire affirmé, puisqu’il s’agit d’un mode de scrutin accordant une prime en nombre de sièges de 25% à la formation politique arrivée en tête.

De tels systèmes sont en vérité qualifiés à tort de proportionnels dès lors qu’ils favorisent de fait une liste, celle qui est arrivée en tête.

Aussi, ne faut-il pas s’étonner qu’un divorce s’installe entre les représentants et les représentés, certaines forces politiques étant exclues de toute représentation et nombre de citoyens ayant ainsi le sentiment que leurs voix ne sont pas prises en compte.

On ne peut dire à cet égard décemment qu’il faut rapprocher les citoyens des politiques et réhabiliter la politique tout en acceptant un système qui privilégie la recherche de fausses majorités au nom d’une prétendue efficacité et d’une hypothétique stabilité tout en excluant de la représentation nationale une partie importante du corps électoral.

Ceux qui ont donné naissance à ce mode de scrutin pour les élections régionales - on pourrait en dire autant de ceux qui ont donné naissance au mode de scrutin retenu pour les élections municipales (avec une prime de 50% pour la liste arrivée en tête) - et qui ont cru qu’ils pourraient bénéficier d’un système leur assurant la formation de majorités stables, amples et confortables de façon pérenne, se retrouvent, à l’image de Frankenstein, dépassés par la créature à laquelle ils ont donné le jour.

Le piège se referme sur eux, tel un effet boomerang, et désormais une force populiste et extrémiste pouvant être cette fois-ci ou sans doute plus tard, si on n’y prend garde, être la grande bénéficiaire d’un système électoral au demeurant inique.

Les avocats de ce type de scrutin devraient admettre leur erreur et reconsidérer leur position. Seule une légitime et équitable représentation des forces politiques en présence permettra demain d’obtenir tant au plan national qu’au plan local (régional, départemental et municipal) de dégager des majorités d’idée ou de projet et l’apparition d’une culture du consensus et non plus le maintien de celle de l’affrontement permanent, c’est-à-dire du camp contre camp, pouvant toujours déboucher, dans des périodes troubles et de grande incertitude caractérisées par des discours de haine et le culte du dénigrement, vers des risques de guerre civile.

La paix sociale et la stabilité des institutions de la République appellent une authentique prise de conscience de la part des femmes et des hommes qui ont aujourd’hui en charge les destinées du pays et de ceux qui y aspirent pour demain.*

Gérard-David Desrameaux 

* Je n’exprime pas cette position eu égard au contexte politique actuel. Il ne s’agit pas d’un propos de circonstance. Il s’agit bien d’une position de fond que je défends depuis toujours et que j’avais eu l’occasion d’exprimer dans mon livre consacré au droit électoral publié en 2013 aux éditions Studyrama et dont je reproduis ci-dessous quelques extraits relatifs aux scrutins mixtes.

 

* Extrait du livre « Droit électoral » de Gérard-David Desrameaux, Editions Studyrama, 2013 :

 

« On oppose traditionnellement les systèmes majoritaires et les systèmes proportionnels, sans oublier les systèmes mixtes qui allient le scrutin uninominal à la représentation proportionnelle, certains candidats étant élus dans le cadre de circonscriptions au scrutin majoritaire et d’autres selon un scrutin proportionnel.

Force est de constater que l’imagination, en matière de conception de modes de scrutin, est particulièrement fertile. Car au-delà de cette division classique, il faut avoir à l’esprit que les modes de scrutin sont légion et particulièrement variés.

Ainsi, au-delà des qualifications et des caractéristiques prêtées à ces types de scrutin, il faut être bien conscient que les descriptions de ces systèmes doivent être relativisées et que les avantages et inconvénients prêtés aux uns et aux autres doivent être nuancés eu égard au fait que les modèles purs sont souvent corrigés par des modalités qui les rapprochent plus ou moins du système opposé.

Ces divers types de scrutin jouent incontestablement sur les résultats. Il faut là encore avoir à l’esprit à cet égard que si autant de systèmes ont pu voir le jour avec des succès au demeurant plus ou moins mitigés, c’est que ceux qui les ont inventés aspiraient à en tirer un certain nombre d’avantages en termes de pouvoir et d’audience politique.

L’étude des modes de scrutin et des règles spécifiques à chaque type d’élection fait apparaître l’existence de dispositions qui varient d’une élection à l’autre sans que l’on sache très bien pourquoi de telles différences existent. La pertinence de ces différences n’apparaît pas vraiment et sans doute une réforme d’ensemble, faite dans la transparence et la cohérence, serait la bienvenue. Encore une fois, des règles claires, équitables et si possible pérennes, devraient être privilégiées quand on fait le choix d’un mode de scrutin.

Pour s’en tenir à deux aspects, rappelons qu’à l’occasion des élections législatives, pour pouvoir se présenter au second tour, il faut avoir obtenu au moins 12,5 % du nombre des électeurs inscrits.

Or, pour pouvoir se présenter au second tour des élections municipales dans les communes de plus de 3500 habitants ainsi que pour les élections régionales, une liste doit avoir obtenu au moins 10 % du nombre des suffrages exprimés.

Dans le même sens encore, s’agissant des primes (pourcentage de sièges supplémentaires accordés en plus à une liste arrivée en tête), le pourcentage n’est pas le même selon le type d’élection.

Ainsi, pour les élections municipales, la liste arrivée en tête obtient la moitié des sièges, le reste des sièges étant réparti entre toutes les listes, y compris celle qui est arrivée en tête selon un mode de scrutin proportionnel à la plus forte moyenne. Les listes n’ayant pas obtenu au moins 5% des suffrages exprimés n’étant pas admises à la répartition des sièges (art. L. 262 du code électoral).

En revanche, pour les élections régionales, la liste arrivée en tête obtient un nombre de sièges égal au quart du nombre de sièges à pourvoir, arrondi à l’entier supérieur. Les autres sièges sont ensuite répartis entre toutes les listes à la représentation proportionnelle suivant la règle de la plus forte moyenne. Là encore, les listes qui n’ont pas obtenu au moins 5% des suffrages exprimés ne sont pas admises à la répartition des sièges (art. L. 338 du code électoral).

Ces disparités ne jouent pas en faveur de la transparence et de la simplicité. Voilà autant de questions auxquelles il serait souhaitable d’apporter des réponses simples et claires à l’occasion d’une réforme d’ensemble se fixant pour objectif de rapprocher les citoyens de la politique et de combattre un désintérêt tout relatif des citoyens pour la chose publique. »

15/03/2015

Le temps presse : instaurons la R.P.

Editorial          

Dans ses vœux aux Français pour 2015, François Bayrou déclarait : « Je crois que la France peut s’en sortir, peut se reconstruire. Il faut seulement qu’elle réponde à trois exigences : un devoir de lucidité, un devoir de courage, « une démocratie nouvelle », avant de plaider pour une « organisation de notre vie publique nationale qui permette qu’un jour puissent travailler ensemble ceux qui partagent une vision constructive de l’avenir, et que nous ne soyons plus soumis à la fatalité de l’affrontement vain de deux camps, qui d’ailleurs, n’existent plus ».

Il faut à cet égard rendre un hommage appuyé à la constance de François Bayrou qui depuis des années déjà combat l’idée d’une France coupée en deux, d’une France à l’intérieur de laquelle deux clans seraient irrémédiablement et inéluctablement appelés à s’entre-déchirer et à s’opposer.

Pour avoir publié un livre en 2007 qui s’intitulait Esquisse d’une démocratie nouvelle et pour avoir dit et écrit depuis des années qu’il fallait privilégier le pluralisme et donc instaurer la représentation proportionnelle, et non pas simplement instiller une dose de proportionnelle, afin de permettre une juste et équitable représentation de tous les courants de pensée au sein du Parlement, je ne puis que saluer positivement la position développée par François Bayrou dans le Journal du Dimanche daté du 15 février 2015 ainsi qu’au Grand Jury RTL, LCI, Le Figaro du 8 mars dernier.

En effet, ce faisant, par ses déclarations récentes, l’ancien candidat à la présidence de la République, François Bayrou, semble désormais se faire l’avocat d’une représentation proportionnelle intégrale et non plus seulement d’une simple dose de proportionnelle, ce qui constitue un acte fort de notre vie politique que bien peu de commentateurs, analystes et politologues ont daigné mettre en exergue, car ils n’osent  pas s’éloigner des sentiers battus et d’une certaine orthodoxie doctrinale et… électorale.

J’ajoute que François Bayrou a cent fois raison quand il dit en substance qu’il faut combattre les causes qui favorisent la poussée des forces extrémistes dans notre pays et rappelle que notre système politique et notre système de gouvernement sont désormais inadaptés avant d’ajouter que la représentation proportionnelle est le seul système qui permet d’avoir recours à des majorités d’idées ou de projets.

Ce constat et ces affirmations ne peuvent et ne doivent demeurer sans lendemain. L’analyse est bonne. Les paroles sont justes. Il faut que des actes significatifs interviennent car notre système politique, eu égard au contexte et à la nécessité impérieuse de mettre un terme au camp contre camp, dès lors que cette opposition manichéenne et brutale ne correspond plus au paysage politique français, doit s’adapter et faire sa mue.

Le temps presse. L’échéance de 2017 se rapproche et avec elle la nécessité de changer fondamentalement les règles du jeu afin que le pluralisme permette à la démocratie et à la République de s’épanouir en France.

Qui, mieux que François Bayrou qui a été privé de l’existence d’un groupe parlementaire important en 2007 après avoir enregistré un certain succès, sinon un succès certain, lors de l’élection présidentielle de la même année, ayant été victime d’un mode de scrutin inadapté, pourrait aujourd’hui se faire le héraut de l’instauration de la représentation proportionnelle ?

Il est urgent d’agir. Nous sommes à deux années des futures élections nationales Or, rien ne sera possible dans l’année qui précèdera ces deux échéances majeures pour améliorer le fonctionnement  de notre démocratie, tant au plan des institutions en général qu’au plan  électoral.

Puisse l’ancien candidat à l’élection présidentielle lancer un appel solennel pour impulser la dynamique nécessaire et prendre les initiatives qui s’imposent. Toutes celles et tous ceux qui sont partisans d’une telle réforme devraient relayer cette démarche, toute sensibilité politique confondue, car il s’agit d’une œuvre de salut public, d’une œuvre d’intérêt général.

 Gérard-David Desrameaux 

25/08/2014

A PROPOS DE LA DEMISSION DU GOUVERNEMENT VALLS

La démission du gouvernement Valls, eu égard  notamment à la conjoncture actuelle et  aux dissensions qui n’ont de cesse de se manifester tant au sein du gouvernement, de la majorité et des oppositions, tant de droite que de gauche, atteste de la nécessité de procéder à une modification en profondeur des institutions de la Ve  République.

Les velléités de constituer des majorités stables et homogènes, nous le voyons chaque jour davantage, sont désormais de plus en plus illusoires car le pays ne peut et ne saurait être à l’avenir  artificiellement divisé en deux camps irrémédiablement irréductibles.

Le camp contre camp a montré ses limites.

Une fois de plus, j’affirme que seule la recherche de majorités d’idées, de majorités à géométrie variable permettra de dégager les nécessaires et légitimes consensus dans le cadre d’institutions rénovées permettant au pluralisme de s’exprimer.

Ces institutions rénovées doivent permettre à toutes les  forces politiques d’être représentées, ce qui nécessite une réforme du mode de scrutin dans le sens de plus de proportionnalité et l’établissement de nouveaux rapports entre pouvoirs publics parallèlement à la recherche d’une plus grande cohérence de l’action gouvernementale et d’une indispensable solidarité gouvernementale.

L’action politique a besoin de  cohérence et de lisibilité. C’est un impératif qui n’est nullement contradictoire avec la recherche de politiques plus consensuelles et des majorités d’idées auxquelles il vient d’être fait référence.

A la monarchie républicaine instaurée en 1958, il est urgent de substituer une démocratie républicaine.

J’aurai l’occasion de développer cette idée et d’indiquer les moyens d’y parvenir au cours des semaines et des mois à venir.

 Gérard-David Desrameaux