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02/09/2018

Le prélèvement à la source : une réforme pour le moins contestable

Editorial

Des incertitudes demeurent quant à la mise en œuvre de cette réforme inutile et dangereuse à plusieurs égards.

Les dernières déclarations du Chef de l’Etat et celles de plusieurs ministres tout récemment accréditent la thèse selon laquelle cette réforme est pour le moins contestable.

Ainsi, à Bercy, à quelques mois de l’introduction du prélèvement à la source de l’impôt sur le revenu en janvier 2019, les services procèdent toujours à un certain nombre d’ajustements et de corrections alors même que le prélèvement a déjà été retardé d’un an, ce qui tend à prouver que tout n’est pas encore parfaitement au point.

Le gouvernement s’efforce néanmoins de rassurer les contribuables et les employeurs qui semblent pour nombre d’entre eux faire preuve d’une certaine inquiétude.

Selon Bercy, 40.000 agents du fisc ont reçu une formation afin d’aider les contribuables à « affronter » les nouveaux mécanismes de prélèvement de l’impôt.

Pour autant, il ressort d’un certain nombre de faits que le gouvernement n’avait pas tout à fait anticipé certaines conséquences de cette réforme.

Ainsi, en est-il notamment du cas des employés de particuliers employeurs du fait du retard pris dans la mise en œuvre de la plate-forme informatique dédiée aux déclarations de salariés.

Dans le même sens, afin de répondre aux inquiétudes exprimées par les chefs de petites entreprises de moins de vingt salariés, un mécanisme a été mis au point leur permettant de se décharger de la collecte de l’impôt en déléguant leur pouvoir en la matière à l’URSSAF.

Toujours dans le même sens, beaucoup de chefs d’entreprises dont on dit qu’il convient de réduire les frais, semblent s’inquiéter quant au coût qu’engendrera ce nouveau dispositif. N’y a-il pas là un paradoxe à vouloir faire des économies pour les services de Bercy en réduisant à terme le nombre de fonctionnaires de cette administration tout en grevant dans le même temps la comptabilité des entrepreneurs ?

Autre hypothèse : reporter le paiement de l’impôt pour cette catégorie en 2020, mais alors il faudrait faire face à un paiement double en 2020 (paiement de l’impôt au titre de 2020 et de 2019).

En terme de simplification et de contemporanéité du paiement de l’impôt, on peut difficilement faire mieux ! Pourquoi complexifier, en l’espèce, alors qu’une mensualisation rendue obligatoire aurait permis d’obtenir des améliorations sensibles et acceptables par les 46% de contribuables redevables de l’impôt sur le revenu dont on dit que 70% d’entre eux sont déjà mensualisés !!

M. Gérald Darmanin a laissé entendre il y a plusieurs semaines que l’on pourrait procéder à une exonération pure et simple de l’impôt pour les employés de particuliers employeurs en 2019.

Quid, alors, du principe d’égalité ?

On peut être sceptique quand on vante les mérites du prélèvement à la source

Il semble tout d’abord que l’aspect psychologique d’une telle réforme a été totalement occulté et que la baisse sensible du salaire net des contribuables assujettis à l’impôt sur le revenu pourrait avoir des conséquences négatives sur la consommation des Français et altérer leur moral et ce, dans un contexte de retour d’une certaine forme d’inflation (2,3% sur un an en juillet 2018), d’augmentation du taux de la CSG (notamment pour les retraités dont cette hausse ne sera pas compensée par une baisse des cotisations sociales).

Si l’on ajoute que cette réforme intervient alors que le point d’indice des fonctionnaires n’a été que modestement relevé en 2016 alors qu’il est bloqué depuis 2010 et que les retraités enregistrent une perte importante de pouvoir d’achat, il y a là des éléments qui ne peuvent que faire naître un sentiment d’insécurité et disons-le d’injustice à l’égard d’une partie de la classe moyenne et notamment supérieure qui ne bénéficiant pour sa part d’aucune aide prend peu à peu conscience que les efforts sont essentiellement demandés à cette classe sociale.

A terme, si l’on n’y prend garde, face à un petit nombre (évalué à 1% des Français les plus riches), on trouvera une masse de Français déclassés et paupérisés, du fait d’un nivellement par le bas.

La mise en œuvre de la retenue à la source (RAS) s’avère bien plus complexe que ce qui avait été annoncé dans un premier temps et ce, même si cette procédure est appliquée dans la quasi-totalité des pays occidentaux.

Les formalités administratives ne sont pas pour autant supprimées.

Ainsi, les contribuables continueront de déclarer chaque année, au printemps, leurs revenus à l’administration. Cette déclaration permettant « d’actualiser » le taux de prélèvement, mais aussi d’intégrer les crédits d’impôt et revenus exceptionnels, pour que le fisc puisse rembourser les « trop perçus » ou réclamer les impôts manquants.

Certains des avocats de cette méthode s’étonnent des inquiétudes de nombre de contribuables français en mettant en avant le fait que cela se passe bien dans la plupart des pays industriels. C’est faire abstraction de la spécificité du système fiscal français, de la dimension familiale de l’imposition, du nombre important de niches fiscales et, osons le dire, de la complexité de ce système.

Cette procédure porte atteinte à la confidentialité.

Ainsi, les employeurs pourront connaître toutes les autres sources de revenus, notamment les revenus fonciers et ceux des conjoints, de leurs salariés, d’où le caractère inquisitorial à certains égards de cette procédure.

Quid du taux neutre, présenté comme un moyen efficace de contrer cette atteinte à la vie privée des salariés ? Quid de sa signification ? Dans une telle hypothèse, si le taux neutre choisi est inférieur au taux réel, il conviendra de payer ultérieurement le solde au fisc. Y a-t-il là encore simplification ou complexification ?

Quid du quotient familial ? Quel taux convient-il d’appliquer aux deux membres du couple ? Des taux individualisés sont possibles en cas de disparités de revenus, mais ne risque t-on pas dans certains cas d’introduire la zizanie au sein du couple ?

Le prélèvement à la source n’empêche pas de continuer à bénéficier de réductions ou de crédits d’impôts.

Quid de l’année blanche ?

Cette année, souvent présentée comme une année d’optimisation pour la période de transition aura bien, eu égard à ce que nous apprenons régulièrement, des effets d’aubaine pour certains contribuables

Des exemptions étant à l’évidence possibles, il existe bien des risques de rupture quant à l’égalité des contribuables comme il a été dit plus haut, donc de l’égalité des citoyens au regard de l’impôt.

Il n’a pas été tenu compte de la dimension psychologique d’une telle réforme. C’est donc une réforme dangereuse politiquement, dont on ne perçoit pas la valeur ajoutée par rapport au système actuellement en vigueur qui a le mérite d’être efficace.

N’oublions pas que seuls 45,2% des Français ont payé l’impôt sur le revenu en 2017. Un tel chiffre est de nature à relativiser l’affirmation selon laquelle les Français seraient favorables à cette méthode de prélèvement. Dans le même sens, sachant que sur les 45 ou 46% des Français assujettis à l’impôt sur le revenu, environ 70% des contribuables sont mensualisés, on est conduit à considérer que cette réforme ne concerne, tout compte fait qu’un petit nombre de nos compatriotes.

Ceux qui ne paient pas l’impôt sur le revenu, ne verront pas les conséquences de ce prélèvement, puisque par définition, ils ne seront pas concernés.

Dès lors, il est permis de s’interroger sur le bien-fondé de la mise en place de ce que d’aucuns n’hésitent pas à qualifier d’usine à gaz.

On a envie de dire pourquoi tout cela pour un résultat dont on n’est même pas certain de l’efficacité, alors qu’une généralisation de la mensualisation permettait d’éviter bien des difficultés.

Une étude d’impact sérieuse aurait pu dresser le bilan des avantages au regard des inconvénients.

L’introduction du prélèvement à la source de l’impôt sur revenu, qui doit entrer (en principe) en vigueur le 1er janvier 2019 est politiquement risquée. Il est à cet égard pour le moins étrange que les pouvoirs publics ne semblent le découvrir que maintenant, c’est-à-dire aussi tardivement. Gouverner, n’est-ce pas anticiper les problèmes ? N’est-ce pas prévoir et appréhender toutes les hypothèses et solutions en dehors de toute contingence partisane ?

Cependant, nous l’affirmons, mieux vaut tard que jamais. Certains disent que revenir désormais sur cette mesure s’apparenterait à un recul. Il me semble davantage que cela s’apparenterait, en l’espèce, à une attitude responsable.

Pour des raisons éthiques, civiques, politiques, voire philosophiques et accessoirement techniques, il y a lieu pour le moins de repenser sérieusement le problème du prélèvement à la source dans le sens d’une non infantilisation du citoyen et d’une plus grande responsabilisation.

En effet, le contribuable est avant tout un citoyen dont le paiement de l’impôt est un acte majeur de sa vie civique dont il doit s’acquitter en tant que membre d’une communauté de destin. Or, de plus en plus, on a tendance à constater une volonté politique délibérée des pouvoirs publics à travers nombre de démocraties, à couper le lien entre les notions de citoyenneté et de contribuable. C’est une grave erreur.

De fait, le prélèvement à la source, tend, selon ses plus ardents défenseurs, à rendre l’impôt plus indolore et à faciliter, paraît-il, la tâche du contribuable, conduisant ainsi, si l’on n’y prend garde, à une sorte d’infantilisation du citoyen contribuable grâce à l’effet anesthésiant de ce type de prélèvement.

Pour autant, les pouvoirs publics ont-ils anticipé les réactions que pourraient avoir à l’avenir les contribuables face à une hausse toujours possible de l’impôt sur le revenu, donc sur le prélèvement obligatoire (à moins qu’ils s’interdisent pour toujours, pour eux et pour leurs successeurs de réévaluer à la hausse le taux d’imposition) ? En effet, dans cette hypothèse, que l’on ne saurait a priori exclure, le prélèvement à la source se manifesterait par une diminution du revenu net figurant sur la feuille de paye. L’impact psychologique serait sans doute plus grand qu’aujourd’hui face à une augmentation de l’imposition.

Sur un plan politique, la retenue à la source conduit à un désengagement de l’Etat, ce dernier étant dessaisi de l’exercice d’une mission éminemment régalienne, celle de la collecte de l’impôt. Il paraît, de ce seul point de vue aberrant de confier le soin à des entrepreneurs, à des chefs d’entreprises, le soin de collecter l’impôt alors qu’il conviendrait pour l’Etat qui entend libérer les entreprises de certaines contraintes et sujétions, comme il a été dit précédemment, de ne pas abandonner l’une de ses prérogatives majeures.

Pour toutes ces raisons, il convient de ne pas donner suite au projet de retenue à la source qui ne correspond pas à la situation fiscale de notre pays.

Gérard-David Desrameaux *

 

 * Pour un approfondissement de la question de la retenue à la source, voir notamment à cet égard, Alexandre Desrameaux, « La retenue à la source de l’impôt sur le revenu en France : retour vers le futur ». Revue européenne et internationale de droit fiscal, Bruylant, 2015, n° 3, pp. 449-458.

30/04/2017

LA FONCTION PRESIDENTIELLE

A PROPOS DE : LA FONCTION PRESIDENTIELLE

 

Dans le chapitre VI, intitulé « Instaurer un régime présidentiel » de mon livre Refondons nos institutions, d’une monarchie républicaine à une démocratie républicaine, publié au mois de novembre 2016, je consacre un certain nombre de développements à la fonction présidentielle.

A quelques jours d’une échéance électorale majeure pour l’avenir de notre pays, je crois opportun d’en reproduire ici quelques extraits. Je procèderai de même dans les jours, semaines et mois à venir, s’agissant d’autres propositions concernant les pouvoirs publics, car il me paraît indispensable de réfléchir rapidement à un aménagement profond de nos institutions en vue d’un meilleur équilibre politique et institutionnel.

 

Revalorisation de la fonction présidentielle

 

            Les pouvoirs du chef de l’Etat doivent demeurer pour l’essentiel ce qu’ils sont aujourd’hui. Il ne s’agit pas de les réduire et de faire du chef de l’Etat un président purement représentatif voué à commémorer, à inaugurer, y compris des chrysanthèmes.

            L’un des acquis de la Ve République, à savoir le renforcement du rôle du chef de l’Etat et de sa place prééminente au sein de nos institutions doit être préservé car, une fois encore, démocratiser nos institutions ne saurait être synonyme d’affaiblissement de l’autorité de l’Etat et de paralysie du pouvoir politique quel qu’il soit.

            A cet égard, les dirigeants, gouvernants et opposants d’hier, d’aujourd’hui et de demain seraient bien inspirés de ne pas s’en prendre outre mesure, souvent avec outrance, à l’élu de la nation car ce faisant ils portent atteinte à la fonction à laquelle ils entendent accéder un jour et scient la branche sur laquelle ils souhaitent se poser.

            Passer de la monarchie républicaine à la démocratie républicaine impose en revanche, tout en revalorisant la fonction présidentielle en la débarrassant de tâches qui ne sont pas de son niveau ou de pratiques qui n’ont pas lieu d’exister et nuisent à son image, de construire un nouvel équilibre entre les pouvoirs publics et sur lesquels il conviendra de se pencher plus loin.

            Revaloriser la fonction présidentielle, c’est vouloir mettre en avant aussi et surtout les prérogatives du chef de l’Etat, élu de la Nation dans son ensemble, en ayant soin d’établir une distinction entre les pouvoirs tels que définis par la Constitution et certaines pratiques, voire dérives, qui nuisent précisément à l’image du chef de l’Etat et donc à travers elle à celle de l’Etat

            Le Président de la République ne peut et ne doit s’occuper de tout. Il n’a pas à intervenir en toutes choses et sur chaque sujet.

            Le chef de l’Etat, devrait être chargé de l’essentiel et être en revanche déchargé de tâches subalternes. Tout ne doit pas, ou ne doit plus, en effet, remonter jusqu’au niveau de la plus haute autorité de l’Etat, celle-ci devant pouvoir se consacrer à l’essentiel et être la garante des choix fondamentaux exprimés par le peuple souverain à l’occasion de l’élection présidentielle.

            Contrairement à ce que certains pensent, ce n’est pas l’élection du Chef de l’Etat au suffrage universel qui pose un problème mais une certaine conception de l’exercice du pouvoir et une certaine pratique de celui-ci. Pour certains observateurs, le poison qui mine la France, c’est le système politique et plus particulièrement le problème de l’élection du Président de la République au suffrage universel.

            Mais alors, dans ces conditions, quid des combinaisons politiques et des recherches permanentes d’hypothétiques coalitions dans le cadre d’un régime parlementaire classique et plus encore dans le cadre d’un régime d’assemblée comme la France en a connu sous la IIIe République et sous la IVe République ?

            En revanche, force est de constater que l’on observe une concentration excessive des pouvoirs entre les mains du Président de la République alors qu’il ne devrait être en charge que de l’essentiel comme il a été dit précédemment.

            Cette concentration entre les mains d’un homme, aussi éminent puisse-t-il être, qui dans les faits est juridiquement et politiquement irresponsable, est pour le moins surprenant et difficilement acceptable.

            C’est l’aspect « présidentialiste » qui est assurément le plus critiquable dans la pratique et l’usage qui est fait des institutions de la Ve République. Ce n’est pas, en revanche, l’affirmation d’un pouvoir présidentiel qui est condamnable en soi.

            A cet égard, on n’insistera jamais assez sur les différences notables qui existent entre un régime présidentiel et un régime présidentialiste. Je vois pour ma part dans ces différences quelque chose qui s’apparente aux différences susceptibles d’exister entre, d’une part, un référendum et, d’autre part, un plébiscite si toutefois une telle comparaison est acceptable pour les puristes et les plus éminents constitutionnalistes.

            Ce sont les dérives et les distances prises à l’égard d’un régime présidentiel type, résultant aussi bien des textes constitutionnels que de la pratique, qui décrédibilisent nos institutions et les fragilisent.

 

Le chef de l’Etat doit prendre de la hauteur.

 

            Le Chef de l’Etat doit prendre de la hauteur. Il lui faut fixer le cap, élaborer un projet pour le court, moyen et long terme.

            Il est nécessaire qu’à l’occasion du rendez-vous clé sous la Ve République qu’est l’élection du chef de l’Etat au suffrage universel direct un objectif précis à atteindre soit défini. Il s’agit de proposer une vision claire de l’avenir, en d’autres termes, offrir un grand dessein aux Françaises et aux Français, aux électrices et aux électeurs.

            Il s’agit moins d’apporter des réponses à toutes les questions qui se posent et de résoudre tous les problèmes qui ne manquent pas de s’additionner dans la vie d’une nation et d’un peuple mais d’indiquer une orientation et de donner du sens à un projet politique présenté par un candidat .

            Il lui faut refuser d’entrer dans les détails de l’action politique menée au jour le jour. Les contraintes du quotidien, les évènements imprévisibles ou difficilement prévisibles viennent parfois bouleverser les meilleurs programmes qui soient et déstabiliser un Homme d’Etat bien intentionné et soucieux de respecter les engagements sur la base desquels il s’est fait élire.

            La réduction de ses domaines d’intervention n’a pas pour objet de revenir à un président style IVe République mais bien davantage, comme il a déjà été dit plus haut de vouloir revaloriser la fonction et la dignité présidentielle, le chef de l’Etat devant être en charge de l’essentiel.

            Le fait de répondre à des questions d’auditeurs, ou et c’est plus grave encore, de journalistes en mal de sensationnel, nuit à l’image du chef de l’Etat et plus encore ternit la fonction elle-même. Il en est de même du rôle envahissant de ce que d’aucuns appellent les réseaux sociaux.

            Si pour certains, les hommes politiques doivent être réactifs et intervenir en toute occasion, en toute circonstance, sur lesdits réseaux, il faut être conscient de ce qu’un tel phénomène présente comme danger pour le devenir même de la démocratie et à fortiori pour l’autorité de l’Etat quand il s’agit d’un chef d’Etat.

            Il convient de ne pas confondre la démocratie avec ce que d’autres ont pu à juste titre qualifier en d’autres temps d’anarchie, ou de tyrannie du quotidien.

            Le général de Gaulle a pu dire que « la politique ne se fait pas à la corbeille ». Aujourd’hui, il y a lieu de dire que la politique ne peut se faire sur Internet, à travers les réseaux sociaux, les blogs, les sites.

            L’Homme d’Etat, à l’instar de la Raison d’Etat, même dans un Etat de droit, se doit d’être à l’abri des pressions des foules et des mouvements d’humeur le plus souvent incontrôlés et irrationnels.

            Trop de « choses » remontent jusqu’au Président de la République. Le chef de l’Etat ne doit avoir en charge que les intérêts supérieurs de l’Etat, ce qui est au demeurant déjà beaucoup.

            Il doit tracer une voie, une orientation, il ne doit pas être un commentateur de l’actualité et a fortiori de sa propre action.

            Il ne doit pas avoir réponse à tout et donner l’impression de tout faire ou de décider de tout.

            A cet égard, le recours répété par des personnes dites « bien informées » à des formules telles que « Le président a dit », « le président veut », « le président souhaite », « Le président a décidé » ou encore,  « Le président a tranché » trahit une approche monarchique du pouvoir et loin de consolider l’autorité du chef de l’Etat l’affaiblit. L’autorité doit s’apprécier quand des décisions importantes doivent être prises dans l’intérêt de l’Etat et non pas pour et en toutes choses de la vie quotidienne.

            A lui, en revanche, de proposer des objectifs à atteindre, de fixer un cap et de tendre à la réalisation d’un grand dessein, encore une fois, en l’absence duquel on ne saurait raisonnablement obtenir l’adhésion à un projet

            La confusion des pouvoirs doit être écartée autant que faire se peut.

            La démocratie républicaine ne saurait se confondre avec les dérives d’une monarchie républicaine qui tend à conférer au chef de l’Etat des pouvoirs qui ne sont pas de son niveau. Tout ne peut et ne doit remonter jusqu’au chef de l’Etat comme s’il devait intervenir en toute chose et sur tout point.

            On observera que paradoxalement, en relevant le niveau d’intervention du chef de l’Etat et en le déchargeant de certaines missions qui manifestement ne devraient pas être de son ressort, on rehausse la fonction présidentielle et la dignité du chef de l’exécutif.»

 Gérard-David Desrameaux

07/10/2014

Remplacer les primaires par un troisième tour à l'élection présidentielle

Editorial

Une fois de plus, le microcosme s’emballe. A plus de deux ans et demi du terme du mandat de l’actuel président de la République, une seule question semble être au centre des préoccupations d’une certaine classe médiatico-politique, à savoir :  « Qui, à droite sera le candidat le plus à même de battre le candidat de gauche quel qu’il soit en 2017 ? ».

 Une fois de plus, des sondages et analystes « sondent les reins et les cœurs » des électeurs et sympathisants et différentes hypothèses sont d’ores et déjà émises.

Les velléités de l’ancien président de la République, Nicolas Sarkozy, de reconquérir la présidence de l’UMP aux fins non pas de sauver ce parti mais de lui substituer une autre formation politique dotée d’un nouveau sigle et de structures également nouvelles  renforcent l’agitation du microcosme dont il vient d’être fait état, tant les spéculations sont nombreuses.

Les candidats potentiels étant déjà légion (N. Sarkozy, A. Juppé, F. Fillon, X. Bertrand), la liste n’est évidemment pas exhaustive, l’idée d’avoir recours à l’organisation de primaires, procédure déjà utilisée en 2011 par le parti socialiste et alors vivement critiquée par l’UMP avant d’être ensuite retenue par d’autres, se développe à la vitesse de la lumière.

Une fois de plus, cette procédure, pour laquelle je n’ai aucune sympathie comme l’attestent mes écrits * depuis plusieurs années, paraît être, à certains, de nature à combler  le « trop plein » de candidatures à droite et au centre en permettant de les départager.

Ce souci ayant évidemment pour principal objectif d’éviter que des candidatures de second rang ne viennent contrecarrer les ambitions de ceux qui entendent figurer au second tour de l’élection présidentielle et, accessoirement, d’empêcher à quelque candidat extrémiste de l’emporter.

Je le réaffirme, il s’agit-là d’une fausse bonne solution.

Les risques de division que l’on prétend combattre en ayant recours à cette procédure demeurent.

Les primaires sont déconnectées du temps réel électoral. En effet, elles interviennent longtemps avant l’échéance électorale normale.

Les primaires n’empêchent pas l’émergence de candidatures de substitution. Rien n’empêche un candidat n’ayant pas participé à la primaire de se présenter, la nature ayant horreur du vide.

Le corps électoral d ‘une « primaire dite ouverte » est trop aléatoire et imprécis.

En vérité, une autre solution existe qui devrait être pérenne, à savoir l’institution d’un troisième tour à l’élection présidentielle, solution que je préconise depuis longtemps.

Dès lors, le premier tour devient la vraie primaire. Celle-ci est généralisée, organisée et en quelque sorte institutionnalisée.

A la différence des primaires dites ouvertes, organisées de façon plus ou moins arbitraire selon les différentes structures partisanes, le premier tour d’un système à trois tours n’est pas déconnecté du temps de l’élection dès lors qu’il s’inscrit lui-même dans le processus électoral.

Il ne ferme pas la porte aux candidatures de personnalités ayant une stature d’homme ou de femme d’Etat. Il libère ceux-ci de la toute-puissance de formations politiques qui entendent demeurer maîtresses du jeu électoral. Il ouvre un espace de liberté en permettant au corps électoral de s’exprimer plus librement sans être « tenu » comme aujourd’hui par cette obsession du « vote utile », véritable épée de Damoclès au-dessus de la tête des candidats, le premier tour n’éliminant pas les candidats ayant obtenu un certain pourcentage de voix qui pourrait être de l’ordre de dix pour cent.

C’est à tort que nombre de médias et de professionnels de la politique (acteurs, élus et observateurs) semblent ne pas vouloir retenir, voire relayer cette proposition.

A certains égards, il est facile d’en comprendre les raisons. En effet, le conservatisme de la pensée est puissant et la remise en cause de schémas classiques, traditionnels, ne  paraît sans doute pas souhaitable à ceux qui aiment « jouer à se faire peur » et à spéculer sur un éventuel effondrement de notre cadre institutionnel.

Pour regrettable que soit ce comportement, je demeure persuadé que tôt ou tard, il y aura lieu d’instaurer un troisième tour à l’élection présidentielle afin de permettre au pluralisme de s’épanouir.

Gérard-David Desrameaux

 

*

  • Instituer un troisième tour à l’élection présidentielle, 17 avril 2011.
  • La défense du pluralisme, 13 juin 2011.
  • Du principe des primaires à l’instauration d’un troisième tour à l’élection présidentielle, 9 octobre 2011.
  • Des élections primaires à l’instauration d’un troisième tour à l’élection présidentielle, 16 octobre 2011.
  • A propos des primaires et de l’instauration d’un éventuel troisième tour, 16 juin 2013