10/01/2018
De l'alternance au partage du pouvoir
Nous reproduisons ci-dessous la conclusion du livre de Gérard-David Desrameaux De l’alternance au partage du pouvoir publié au mois de novembre 2017 aux Editions Bréal.
Partager le pouvoir, ce n’est pas organiser la confusion du pouvoir et moins encore la paralysie du pouvoir, c’est rechercher un équilibre des pouvoirs afin que les intérêts de la cité comme ceux de l’Etat soient défendus et débattus dans la clarté et une totale transparence.
Au-delà des textes, au-delà des intentions, des réformes promises, voire engagées, il faut en appeler à une éthique de la responsabilité, à un changement des esprits et des comportements.
La politique a besoin de cohérence et de lisibilité. Sans clarté et sans objectifs nettement définis et respectés dans la mise en œuvre, c’est toute la confiance d’un peuple qui est mise à mal.
Un changement radical dans la façon de faire de la politique correspond à une ardente obligation. Rien ne sera possible sans une dimension éthique et une volonté d’apaiser les relations entre les femmes et hommes de notre pays.
Encore une fois, il faut passer de la déliquescence à la quintessence du discours politique et être capable de tracer une voie, fixer un cap, proposer de grands desseins et penser des projets politiques en sachant mettre sous le boisseau les petites rivalités partisanes et les petites ambitions personnelles . Le renouveau de la politique passe peut-être et plus sûrement par ce chemin que par des alternances radicales.
Unis dans la diversité, la devise européenne, devrait inspirer la classe politique française.
Refonder nos institutions est une nécessité pour éviter de dériver vers je ne sais quelle rive incertaine et d’aller vers je ne sais quel type de régime autoritaire ou populiste.
Le partage du pouvoir, au-delà des mots, au-delà de la formule, est une exigence démocratique. Enfin, il doit être bien clair, mais est-il utile de le préciser, que le partage du pouvoir s’entend non pas du partage des avantages du pouvoir mais du partage des prises de décision, donc de l’exercice du pouvoir.
Au demeurant, en appeler à un partage du pouvoir et combattre les clans opposés systématiquement les uns aux autres ne signifie nullement vouloir la fin des clivages. Il ne s’agit pas d’aller vers une force hégémonique, fut-elle centrale, qui serait de nature à réduire les débats en son sein et à opposer une vision uniforme de la société.
Réduire les antagonismes, ce n’est pas nier les sensibilités et les différences, c’est au contraire leur permettre de se développer en dehors de tout sectarisme et dogmatisme et c’est aussi éviter le mortel moule de la pensée unique. C’est aussi et surtout mettre un terme à des divisions artificielles qui ternissent l’image de la politique et à travers elle celle de la démocratie.
Gérard-David Desrameaux
11:44 Publié dans éditoriaux | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : de l'alternance au partage du pouvoir, gérard-david desrameaux, éditions bréal, institutions, pluralisme
13/11/2017
COMMUNIQUE
Nous vous informons de la parution aux éditions Bréal du dernier livre de Gérard-David Desrameaux intitulé De l’alternance au partage du pouvoir - Faut-il en finir avec nos modes de scrutin ? Cet ouvrage est disponible en librairie et en ligne depuis le 8 novembre dernier.
Dans ce livre, l’auteur fait le constat suivant : Nos modes de scrutin et notre pratique politique favorisent le clan contre clan et cela a pour effet d’engendrer dans notre pays, depuis des décennies, un climat de guerre civile larvée se caractérisant par des discours radicalisés et souvent irresponsables. De fait, la vie politique française est rythmée par des alternances successives créant ainsi une nouvelle forme d’instabilité politique, tout nouveau pouvoir remettant en cause presque systématiquement ce qui a été fait par le pouvoir précédent.
En s’appuyant sur les fondements de la Ve République et sur l’évolution de la Constitution, Gérard-David Desrameaux préconise ici de substituer au concept d’alternance celui de partage du pouvoir ; autrement dit de majorités à géométrie variable, pour remédier à cette situation.
Pour mémoire, ce livre s’inscrit dans la suite logique d’un précédent livre de Gérard-David Desrameaux publié en novembre 2016 aux éditions Lanore intitulé Refondons nos institutions – d’une monarchie républicaine à une démocratie républicaine.
Dans ce denier livre, l’auteur préconisait notamment une refondation du système politique français en garantissant un pluralisme effectif et une révision de notre Constitution permettant de donner le jour à un modèle français de régime présidentiel (voir sur ce site le communiqué du 5 novembre 2016 qui apporte quelques précisions supplémentaires sur le contenu de l’ouvrage précité).
30/04/2017
LA FONCTION PRESIDENTIELLE
A PROPOS DE : LA FONCTION PRESIDENTIELLE
Dans le chapitre VI, intitulé « Instaurer un régime présidentiel » de mon livre Refondons nos institutions, d’une monarchie républicaine à une démocratie républicaine, publié au mois de novembre 2016, je consacre un certain nombre de développements à la fonction présidentielle.
A quelques jours d’une échéance électorale majeure pour l’avenir de notre pays, je crois opportun d’en reproduire ici quelques extraits. Je procèderai de même dans les jours, semaines et mois à venir, s’agissant d’autres propositions concernant les pouvoirs publics, car il me paraît indispensable de réfléchir rapidement à un aménagement profond de nos institutions en vue d’un meilleur équilibre politique et institutionnel.
Revalorisation de la fonction présidentielle
Les pouvoirs du chef de l’Etat doivent demeurer pour l’essentiel ce qu’ils sont aujourd’hui. Il ne s’agit pas de les réduire et de faire du chef de l’Etat un président purement représentatif voué à commémorer, à inaugurer, y compris des chrysanthèmes.
L’un des acquis de la Ve République, à savoir le renforcement du rôle du chef de l’Etat et de sa place prééminente au sein de nos institutions doit être préservé car, une fois encore, démocratiser nos institutions ne saurait être synonyme d’affaiblissement de l’autorité de l’Etat et de paralysie du pouvoir politique quel qu’il soit.
A cet égard, les dirigeants, gouvernants et opposants d’hier, d’aujourd’hui et de demain seraient bien inspirés de ne pas s’en prendre outre mesure, souvent avec outrance, à l’élu de la nation car ce faisant ils portent atteinte à la fonction à laquelle ils entendent accéder un jour et scient la branche sur laquelle ils souhaitent se poser.
Passer de la monarchie républicaine à la démocratie républicaine impose en revanche, tout en revalorisant la fonction présidentielle en la débarrassant de tâches qui ne sont pas de son niveau ou de pratiques qui n’ont pas lieu d’exister et nuisent à son image, de construire un nouvel équilibre entre les pouvoirs publics et sur lesquels il conviendra de se pencher plus loin.
Revaloriser la fonction présidentielle, c’est vouloir mettre en avant aussi et surtout les prérogatives du chef de l’Etat, élu de la Nation dans son ensemble, en ayant soin d’établir une distinction entre les pouvoirs tels que définis par la Constitution et certaines pratiques, voire dérives, qui nuisent précisément à l’image du chef de l’Etat et donc à travers elle à celle de l’Etat
Le Président de la République ne peut et ne doit s’occuper de tout. Il n’a pas à intervenir en toutes choses et sur chaque sujet.
Le chef de l’Etat, devrait être chargé de l’essentiel et être en revanche déchargé de tâches subalternes. Tout ne doit pas, ou ne doit plus, en effet, remonter jusqu’au niveau de la plus haute autorité de l’Etat, celle-ci devant pouvoir se consacrer à l’essentiel et être la garante des choix fondamentaux exprimés par le peuple souverain à l’occasion de l’élection présidentielle.
Contrairement à ce que certains pensent, ce n’est pas l’élection du Chef de l’Etat au suffrage universel qui pose un problème mais une certaine conception de l’exercice du pouvoir et une certaine pratique de celui-ci. Pour certains observateurs, le poison qui mine la France, c’est le système politique et plus particulièrement le problème de l’élection du Président de la République au suffrage universel.
Mais alors, dans ces conditions, quid des combinaisons politiques et des recherches permanentes d’hypothétiques coalitions dans le cadre d’un régime parlementaire classique et plus encore dans le cadre d’un régime d’assemblée comme la France en a connu sous la IIIe République et sous la IVe République ?
En revanche, force est de constater que l’on observe une concentration excessive des pouvoirs entre les mains du Président de la République alors qu’il ne devrait être en charge que de l’essentiel comme il a été dit précédemment.
Cette concentration entre les mains d’un homme, aussi éminent puisse-t-il être, qui dans les faits est juridiquement et politiquement irresponsable, est pour le moins surprenant et difficilement acceptable.
C’est l’aspect « présidentialiste » qui est assurément le plus critiquable dans la pratique et l’usage qui est fait des institutions de la Ve République. Ce n’est pas, en revanche, l’affirmation d’un pouvoir présidentiel qui est condamnable en soi.
A cet égard, on n’insistera jamais assez sur les différences notables qui existent entre un régime présidentiel et un régime présidentialiste. Je vois pour ma part dans ces différences quelque chose qui s’apparente aux différences susceptibles d’exister entre, d’une part, un référendum et, d’autre part, un plébiscite si toutefois une telle comparaison est acceptable pour les puristes et les plus éminents constitutionnalistes.
Ce sont les dérives et les distances prises à l’égard d’un régime présidentiel type, résultant aussi bien des textes constitutionnels que de la pratique, qui décrédibilisent nos institutions et les fragilisent.
Le chef de l’Etat doit prendre de la hauteur.
Le Chef de l’Etat doit prendre de la hauteur. Il lui faut fixer le cap, élaborer un projet pour le court, moyen et long terme.
Il est nécessaire qu’à l’occasion du rendez-vous clé sous la Ve République qu’est l’élection du chef de l’Etat au suffrage universel direct un objectif précis à atteindre soit défini. Il s’agit de proposer une vision claire de l’avenir, en d’autres termes, offrir un grand dessein aux Françaises et aux Français, aux électrices et aux électeurs.
Il s’agit moins d’apporter des réponses à toutes les questions qui se posent et de résoudre tous les problèmes qui ne manquent pas de s’additionner dans la vie d’une nation et d’un peuple mais d’indiquer une orientation et de donner du sens à un projet politique présenté par un candidat .
Il lui faut refuser d’entrer dans les détails de l’action politique menée au jour le jour. Les contraintes du quotidien, les évènements imprévisibles ou difficilement prévisibles viennent parfois bouleverser les meilleurs programmes qui soient et déstabiliser un Homme d’Etat bien intentionné et soucieux de respecter les engagements sur la base desquels il s’est fait élire.
La réduction de ses domaines d’intervention n’a pas pour objet de revenir à un président style IVe République mais bien davantage, comme il a déjà été dit plus haut de vouloir revaloriser la fonction et la dignité présidentielle, le chef de l’Etat devant être en charge de l’essentiel.
Le fait de répondre à des questions d’auditeurs, ou et c’est plus grave encore, de journalistes en mal de sensationnel, nuit à l’image du chef de l’Etat et plus encore ternit la fonction elle-même. Il en est de même du rôle envahissant de ce que d’aucuns appellent les réseaux sociaux.
Si pour certains, les hommes politiques doivent être réactifs et intervenir en toute occasion, en toute circonstance, sur lesdits réseaux, il faut être conscient de ce qu’un tel phénomène présente comme danger pour le devenir même de la démocratie et à fortiori pour l’autorité de l’Etat quand il s’agit d’un chef d’Etat.
Il convient de ne pas confondre la démocratie avec ce que d’autres ont pu à juste titre qualifier en d’autres temps d’anarchie, ou de tyrannie du quotidien.
Le général de Gaulle a pu dire que « la politique ne se fait pas à la corbeille ». Aujourd’hui, il y a lieu de dire que la politique ne peut se faire sur Internet, à travers les réseaux sociaux, les blogs, les sites.
L’Homme d’Etat, à l’instar de la Raison d’Etat, même dans un Etat de droit, se doit d’être à l’abri des pressions des foules et des mouvements d’humeur le plus souvent incontrôlés et irrationnels.
Trop de « choses » remontent jusqu’au Président de la République. Le chef de l’Etat ne doit avoir en charge que les intérêts supérieurs de l’Etat, ce qui est au demeurant déjà beaucoup.
Il doit tracer une voie, une orientation, il ne doit pas être un commentateur de l’actualité et a fortiori de sa propre action.
Il ne doit pas avoir réponse à tout et donner l’impression de tout faire ou de décider de tout.
A cet égard, le recours répété par des personnes dites « bien informées » à des formules telles que « Le président a dit », « le président veut », « le président souhaite », « Le président a décidé » ou encore, « Le président a tranché » trahit une approche monarchique du pouvoir et loin de consolider l’autorité du chef de l’Etat l’affaiblit. L’autorité doit s’apprécier quand des décisions importantes doivent être prises dans l’intérêt de l’Etat et non pas pour et en toutes choses de la vie quotidienne.
A lui, en revanche, de proposer des objectifs à atteindre, de fixer un cap et de tendre à la réalisation d’un grand dessein, encore une fois, en l’absence duquel on ne saurait raisonnablement obtenir l’adhésion à un projet
La confusion des pouvoirs doit être écartée autant que faire se peut.
La démocratie républicaine ne saurait se confondre avec les dérives d’une monarchie républicaine qui tend à conférer au chef de l’Etat des pouvoirs qui ne sont pas de son niveau. Tout ne peut et ne doit remonter jusqu’au chef de l’Etat comme s’il devait intervenir en toute chose et sur tout point.
On observera que paradoxalement, en relevant le niveau d’intervention du chef de l’Etat et en le déchargeant de certaines missions qui manifestement ne devraient pas être de son ressort, on rehausse la fonction présidentielle et la dignité du chef de l’exécutif.»
Gérard-David Desrameaux